L'Algérie a signé un mémorandum de coopération en matière de défense avec les États-Unis en réponse à l'influence croissante de la Russie dans la région du Sahel, qui a contourné les intérêts algériens, malgré les relations historiques entre Alger et Moscou.
L'Algérie renforce sa coopération militaire avec Washington à travers un mémorandum signé dans la capitale algérienne entre le commandant du Commandement militaire africain (AFRICOM), Michael Langley, et le ministre algérien délégué à la Défense nationale, ainsi que le chef d'état-major de l'armée, le général Saïd Chengriha. Après la signature, Langley a rencontré le président algérien Abdelmadjid. Tebboune, consolidant ainsi le rapprochement entamé depuis plusieurs mois.
Le rapprochement militaire avec les Etats-Unis reflète la volonté de l'Algérie de réorienter sa relation avec Washington en réponse à ses liens de plus en plus froids avec la Russie, son partenaire historique. Ce changement est accentué par le rôle joué par Moscou ces dernières années, qui a commencé à concurrencer l'influence régionale de l'Algérie au Sahel.
L'Algérie considère que son déclin dans la région et la remise en cause de son influence par les régimes militaires sahéliens font partie de la pénétration de la Russie, qui n'a pas pris en compte les intérêts stratégiques de l'Algérie. Cette situation est devenue une menace directe pour la souveraineté et la sécurité de l'Algérie, notamment en raison de la position des nouveaux dirigeants maliens qui, à la suite du coup d'État, ont lancé une offensive contre les groupes alliés de l'Algérie sous le prétexte de lutter contre les organisations terroristes.
La coopération en matière de sécurité et de renseignement est un pilier essentiel des relations algéro-américaines depuis des années. Toutefois, les orientations politiques de l'Algérie ont maintenu son alliance militaire avec la Russie, jusqu'à ce que la nouvelle transformation géopolitique dans la région, entraînée par l'arrivée du groupe Wagner dans les pays du Sahel, change la situation. L'implication de Wagner dans des coups d'État contre des gouvernements élus et son action ultérieure pour défier les intérêts occidentaux et algériens ont marqué un tournant.
Cette photographie non datée distribuée par l'armée française montre trois mercenaires russes, à droite, dans le nord du Mali - AP/FRENCH ARMY
L'homme fort algérien Chengriha a profité de la rencontre avec Michael Langley pour féliciter le président Donald Trump à l'occasion de son investiture. Ce geste reflète la volonté des dirigeants militaires algériens de favoriser des relations de coopération fructueuses avec les États-Unis, qui pourraient déboucher sur de futurs contrats d'armement.
A l'issue de la rencontre avec Tebboune, le commandant de l'AFRICOM a mis en exergue les liens « historiques profonds » entre les deux pays, marqués par « un respect mutuel et des préoccupations communes pour la stabilité et la sécurité de la région ».
Pour sa part, Chengriha a souligné que l'Algérie s'est engagée à renforcer les relations de coopération bilatérale dans divers domaines et secteurs, y compris la défense et la sécurité.
Le président algérien Abdelmadjid Tebboune participe à une session du Forum économique international de Saint-Pétersbourg (SPIEF) à Saint-Pétersbourg, Russie, le 16 juin 2023 - RIA NOVOSTI/ PAVEL BEDNYAKOV via REUTERS
L'Algérie s'emploie à surmonter les barrières qui la séparent de Trump qui, lors de son précédent mandat, a donné l'impression de privilégier sa relation avec le Maroc - rival d'Alger dans la région - notamment après avoir reconnu la souveraineté du Royaume sur le Sahara occidental.
En accueillant le commandant de l'AFRICOM, l'Algérie cherche à envoyer un message clair à la nouvelle administration américaine quant à sa volonté de coopérer et de renforcer ses intérêts dans la région. Cela implique un changement dans l'orientation de la coopération militaire, qui a été menée pendant des décennies par son partenaire russe. Ce changement est complété par un récent rapprochement politique et diplomatique avec Washington, sous la forme d'une série de contacts et de visites.
Donald Trump lors d'un rassemblement de victoire MAGA au Capital One Arena, un jour avant sa cérémonie d'investiture - PHOTO/ RÉSEAUX SOCIAUX.
Suite à ce rapprochement, les autorités algériennes espèrent un important contrat d'armement. À cet égard, il convient de noter que les dépenses de défense de l'Algérie ont atteint des niveaux record en préparation de ce qu'elles considèrent comme des « menaces régionales sans précédent », dans un contexte d'insécurité croissante dans les pays du Sud.
Bloomberg a rapporté mardi que les dépenses de défense de l'Algérie atteindront un niveau record de 3,35 trillions de dinars (25,1 milliards de dollars), ce qui en fait « l'un des plus élevés au Moyen-Orient et en Afrique du Nord » et représente environ un cinquième du budget total du pays cette année
Atalayar