
Ces derniers jours, le débat qui a entouré la question migratoire en Mauritanie, a pris des propensions énormes au point de créer une véritable psychose nationale, les réseaux sociaux, médias hélas dérégulés, amplifiant l’amalgame à l’échelon sous régional mettant en danger, à la fois, nos ressortissants dans des pays voisins et frères et les ressortissants de ces pays présents sur notre sol. Au cours de ce diner des cons, entre surenchères politiques et lynchages virtuels, chacun crachait sa haine sur l’Autre, dans une cacophonie tumultueuse où la peur est devenue généralisée. D’abord, il y a lieu de préciser qu’il y a trois types de migrants en Mauritanie. Premièrement, il y a les résidents de quelque nationalité qu’elle soit, qui sont établis chez nous avec des titres de séjours réguliers et qui vivent le plus normalement du monde. Il y a, ensuite, ceux qui, pour des raisons objectives sont des réfugiés ou demandeurs d’asile sur notre territoire et sont gérés suivant le droit international avec l’appui des organisations onusiennes et les Ongs humanitaires. Et enfin, il y a les migrants illégaux, objets de la traite des êtres humains qui est la troisième activité illégale la plus importante après le trafic de drogue et d’armes et ce fléau ne date pas d’aujourd’hui puisque notre pays a promulgué une loi relative à la traite des personnes en 2003 déjà et notre Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération et le Directeur général de l'OIM, Brunson McKinley, ont signé un accord portant sur l'ouverture d'un bureau de l'OIM à Nouakchott le 10 aout 2007. En 2020 notre pays a promulguée également la Loi no 2020-017 relative à la prévention et la répression de la traite des personnes et la protection des victimes. A cela s’ajoute, aussi, la mise en place d’une juridiction spéciale pour le trafic humain. Il faut dire que ce phénomène est une préoccupation pour tous les pays du monde.
Et l’accord entre la Mauritanie et l’Union Européenne dans tout cela ? Eh bien, rien. Au moins pour ceux qui ont pris la peine de le lire puisqu’il est en ligne sur le site web de la Commission européenne. D’abord, il ne s’agit pas d’un accord, mais d’une déclaration conjointe de partenariat sur les migrations entre la Mauritanie et l’Union Européenne, signée le 7 mars 2024. C’est un acte non contraignant comme le stipule le dernier paragraphe du document, « les dispositions de la présente déclaration commune et le plan d’action n’ont pas pour objectif de créer des droits ou des obligations juridiques relevant du droit international ou national ». Alors qu’en tire la Mauritanie et est-ce vrai que ce partenariat fera de notre pays une arrière-cour de la migration ? La Feuille de route de la déclaration mentionne cinq axes prioritaires dont la création de perspectives d’emploi pour les jeunes mauritaniens, encourager la mobilité des étudiants, chercheurs et hommes d’affaires mauritaniens, avec la possibilité d’exemption des visas de courte durée ou des frais de visa, soutenir en Europe les réseaux de la diaspora mauritanienne et l’intégration des migrants mauritaniens réguliers et en leur facilitant le transfert de fonds pour le développement de la Mauritanie.
Concernant la lutte contre l’immigration irrégulière et le trafic de migrants, le Chef de la coopération de la délégation de l’Union européenne en Mauritanie, a affirmé qu’il s’agit de : "Combattre et poursuivre les réseaux de passeurs des migrants et les réseaux de traite des êtres humains."
Concernant les expulsions vers la Mauritanie, le document ne mentionne que le retour potentiel "des Mauritaniens en séjours irrégulier en Europe". Une précision importante selon Abdessalam Ould Mohamed Saleh, ministre de l’Économie : "J’affirme ici que la Mauritanie ne sera jamais la patrie (alternative) des migrants illégaux étrangers. Nous ne les recevrons pas, ne les abriterons pas et ne leur accorderons pas la citoyenneté.", interrogé à l’époque par RFI.
Par Mohamed Ould Khayar- Journaliste